Avec Marguerite Guély, présidente de la Société scientifique, historique et archéologique de la Corrèze
Dans des temps troublés et oubliés, Gondovald, fils de Clothaire 1er, lui même fils de Clovis, roi des Francs, devint Roi de Brive. Nous sommes en 584. Son nom signifie guerrier audacieux. Gondovald est au centre d’une guerre de succession au sein de la dynastie des mérovingiens. Il veut régner sur un vaste territoire qui s’étend bien au-delà du Bas-Limousin mais l’histoire en décidera autrement…
Voilà une histoire passée sous les radars... D’abord, parce qu’elle est très ancienne. Nous sommes au VIe siècle. C’est le haut Moyen Âge, une période lointaine de l'histoire comprise, grosso modo, entre l'Antiquité et le Moyen Âge central. La ville de Brive n’existe probablement pas encore. Nous sommes dans les profondeurs des Temps Obscurs. Et les témoignages qui nous sont parvenus sont très rares. Seul Grégoire de Tours (538 - 594) évoque ce Roi de Brive. Grégoire de Tours n’est pas historien mais chroniqueur : "il faut prendre tous ses dires avec une extrême prudence" prévient l’historienne Marguerite Guély. À cette époque quoi ressemble le Bas-Limousin ? La Gaule pouvait être peuplée, pas vraiment forestière et elle devait disposer d’un réseau routier que César a utilisé pour la conquérir.
Un exil à Constantinople
À quoi ressemble Gondovald ? Un homme aux cheveux longs. Eduqué. Gondovald sait lire et écrire. À la cour, sa mère le présente comme le fils naturel de Clothaire. Ce dernier affirme le contraire, le fait tondre et l’emprisonne mais le jeune futur Roi s’évade. Débute pour Gondoval un long périple qui passera par l’Italie et par l’Empire byzantin. Il se marie puis assure une descendance. On présage qu’il a une cinquante d’années lorsqu’il arrive à Brive pour être sacré, non pas Roi de Brive, mais Roi d’Aquitaine. Il débarque à Marseille puis, prend la direction d’Avignon, fief des adversaires de Clothaire, qui le choisissent comme leur porte-drapeau. C’est l’hiver. Son trajet vers Brive, on ne le connait pas.
Pourquoi Brive ?
"C’est un carrefour de la grande route qui va Bordeaux à Clermont-Ferrand" précise Marguerite Guély. Et puis, Brive c’est aussi un pont entre Paris et Toulouse (dans la langue gauloise, briva désigne un pont) : "À Brive, il n’y a qu’une petite église dédiée à Saint Martin l’Espagnol, un Saint tout à fait obscur connu seulement à Brive" indique Marguerite Guély. Donc, un carrefour géographique stratégique. Le sacre intervient à Brive : le futur Roi doit se tenir debout sur un bouclier porté par ses frères d’armes. Mais, d’aucuns y verront un mauvais pressage, Gondolvald perd l’équilibre… Fraichement âcretés Roi d’Aquitaine, Gondovald court vers sa destinée avec les conjurés : Angoulême, Bordeaux, Toulouse puis à Comminges où l’histoire va brutalement se terminer… Le siège de Comminges prend fin à cause d’une trahison. Une pierre lui fracasse la tête. Le Roi est mort. Vive le Roi !
Une rue Gondovald et une Île du Roi
Le sacre de Gondolvald tombe ensuite dans les oubliettes de l’Histoire jusqu’à la création de la Société scientifique, historique et archéologique de la Corrèze. Quelques érudits curieux et intéressés par l’histoire romaine, déterrent cet épisode royal dans les chroniques de Grégoire de Tours. Une histoire ensuite améliorée. "Ils ont prétendu que le sacre de Gondovald avait eu lieu sur une petite île, sur la Corrèze : l’île du Reyt, devenue, l’île du Roi". Pour autant, Marguerite Guély rappelle que "l’île du Reyt" signifie "l’île du passage à gué".
Alors, que reste-t-il de Gondovald ? À Brive donc, pas grand-chose… Une petite rue, à proximité de l’avenue Ribot, porte encore son nom. Peu ou pas d’automobilistes savent qu’ils empruntent ce que l’on pourrait (presque) appeler une voie royale…